Ce qui fonde, entre autres, la phénoménologie psychotique c’est le sentiment de fusion retrouvé dans les délires, qu’ils soient paranoïaques ou non.
La « mission » représente bien la figuration du fantasme fondamental d’être lié à « Dieu », d’être « Son élu », de faire « Sa volonté », d’être inspiré « par Lui ».
C’est le fantasme fondamental de fusion qui ne se cantonne plus seulement dans la nuit de l’Inconscient mais qui éclate au grand jour de la vie psychique représentative.
Ce fantasme fait écho à l’illusion que « Dieu » est dans le monde.
Mais « Dieu » dans le monde revient bien en dernière analyse au « Diable » des contes et légendes.
Car au fil du temps le concept de « Dieu » se constitue dans un long procès de « dematerialisation », de mise hors le « monde » de certains éléments fondamentaux et originels de la Psyché.
« Dieu » est ainsi devenu « Celui » qui est hors le « monde ».
« Dieu » est hors le « monde » et le monde est son « reflet », sa « mise en morceaux » comme énoncé par la métaphysique.
Si « Dieu » est dans le monde comment l’homme peut-il accéder à la liberté, au sens, au vrai ?
Si « Dieu » est dans le monde comment échapper à l’aliénation ?
On a bien compris que « Dieu » dans le monde revient à la position fusionnelle la plus archaïque.
C’est bien l’émergence de la Loi, de la fonction tiers, de la fonction symbolique, qui impose peu à peu aux reliquats de la fusion originelle de s’exporter en un « ailleurs » qui deviendra progressivement dépositaire d’une gigantesque aspiration.
A la fois il s’agit de « liquider » la fusion originelle par un écart, par une fente, par une distance, toujours plus poussés et à la fois il s’agit d’idéaliser cet écart qui va devenir réellement le paradigme, le levier incontournable du développement moral et cognitif de l’humanité.
Il y a un amour initial aussi démesuré que confusionnant pour l’esprit et qu’il convient de briser tout en réifiant la composante « Amour » en cet « ailleurs » qui va définir le « hors le monde ».
Une fois cet « ailleurs » constitué il va devenir le phare de la progression de l’humanité vers la connaissance, connaissance libérée de l’idolâtrie.
Cet « ailleurs » va devenir l’étoile flamboyante d’une connaissance affranchie des scories fantasmagoriques de l’Imaginaire.
Cet « ailleurs » est à même de constituer véritablement le pont salutaire allant du connu à l’inconnu, de l’Imaginaire au Symbolique, du réel à la Réalité.
Et cet « ailleurs » né de la Loi impose à son tour d’être en la Loi.
Et la Loi se fait Amour.
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