Où le front remplace souvent de façon métaphorique l’œil.
Dans le cas clinique rapporté par Abraham (Œuvres complètes : Limitations et modifications du voyeurisme chez les névrosés…) le fantasme d’atteindre le front du professeur par une balle revient à une attaque sur l’œil et donc, en dernière analyse, à une tentative de castration (sur le professeur – substitut paternel).
Donc la ligne symbolique œil – pénis s’enrichit et l’on obtient l’axe œil – pénis – front.
Cela nous évoque le Cyclope des mythes grecs, avec sa vision monoculaire, ainsi que la notion philosophicoreligieuse du troisième œil.
Abraham rapporte également le rêve d’une de ses patientes qui compare l’œil à un gland (partie anatomique du sexe masculin).
On se souvient de certaines représentations du gland comme traversant la manifestation ou le réel.
Le gland serait donc symboliquement représentatif de ce qui traverserait le voile de l’ignorance, ou autrement dit de ce qui permettrait de « Voir ».
Ce qui nous amène à certaines considérations à propos du passage de la représentation maternelle à la représentation paternelle du « regard ».
Certainement au départ, dans l’histoire de l’humanité, l’omniscience fantasmée est maternelle puis elle devient paternelle avec la révolution patrilinéaire.
Celui qui est investi de la toute-puissance voit.
La symbolique du soleil, « qui sait tout », « qui voit tout », est éloquente à ce titre-là et, d’autre part, nous retrouvons parfois dans un passé lointain ce glissement d’une représentation maternelle du soleil à une représentation paternelle.
On constate, en effet, un passage de la Toute-puissance maternelle subséquente à la fantasmatique de fusion mère-enfant, à la Toute-puissance paternelle coïncidant, quant à elle, à une fantasmatique phallique ou plus exactement narcissique-phallique.
Donc le pouvoir de la vue glisse subrepticement de la toute-puissance maternelle fantasmée à la toute-puissance paternelle également fantasmée.
D’autre part la vue, conçue comme un rayon partant de l’œil pour embrasser le réel, c’est-à-dire comme un jaillissement centrifuge, est d’essence masculine et active et implique ce qui est retrouvé dans le voyeurisme, c’est-à-dire une volonté de « saisir » l’objet du regard.
Mais la vue peut aussi être conçue comme un phénomène passif et féminin au cours duquel le rayon lumineux part de l’objet pour atteindre la rétine.
Ce qui voudrait dire que la sortie d’une vision Imaginaire, binoculaire en quelque sorte, pour atteindre à une vision symbolique, unifiée, serait de l’ordre du passage d’un mouvement passif, de l’ordre du réel, à un mouvement actif, de l’ordre de la Réalité.
Le mouvement se ferait donc de voir à Voir.
Et Voir implique un changement fondamental de perspective, Voir impose d’être.
Voir c’est tout bonnement, de par la Loi, aller sans cesse « de R1 à R2 », aller sans cesse « là où il faut » !
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Écrits en rapport :
– De R1 à R2 ou de l’unification de tous les savoirs.
– La conscience dans sa dimension d’opposition Conscient/Inconscient.