Le fait de mourir peut recouvrir le fantasme de retourner à la Terre, à la Totalité, à la Mère.
Et mourir peut avoir la signification de capituler, de ne pas pouvoir accéder à la pensée, de ne pas pouvoir élaborer psychiquement le meurtre du « monde » (monde Imaginaire), le meurtre de la « chose ».
Et mourir peut également être en rapport avec des fantasmes de déréalisation ; « le monde n’est qu’illusion », il n’a pas d’existence réelle », etc., et l’acte de mourir volontairement peut s’inscrire dès lors dans ce déni du monde et de la Réalité comme une sorte de tentative de fuir cet univers vécu comme dénué de sens, cet enfer en quelque sorte, car l’enfer, au bout du compte, n’est ni plus ni moins que non-sens.
Ce qui constitue le cœur de tous ces vécus ; vouloir recréer la Totalité, ne pas pouvoir élaborer sur la sortie du monde ou existence, ne pas pouvoir se départir d’un sentiment d’irréalité, être en exil du sens, vivre le « non-être », est subséquent à la méconnaissance fondamentale de la fonction symbolique qui, elle seule, permet de Mourir.
En confusion, en aliénation, la signification profonde de la « transcendance » ou ascension sur l’axe vertical de la symbolisation, échappe…
L’importance majeure de la clarté de la conscience et la liberté profonde qui lui est associée n’est pas recherchée et pire elle n’est même pas entrevue.
La seule chose qui importe est de rester captif dans la caverne, dans la crypte, dans l’enfermement.
Donc mourir peut s’inscrire dans cette curieuse revendication, il bien dit ; « le corps revient à la terre, et l’âme ad padre ! », mais en l’occurrence, ici, c’est la première partie de la proposition qui est recherchée.
Chez certains désespérés cet aspect est particulièrement actif avec un monde vécu comme dépourvu de sens, une existence qui frise à l’éternelle inexistence, une « présence » devenue immortelle absence, un vide indescriptible et sans fin, et un temps qui s’éternise dans l’immuabilité.
Tout se fige et le seul acte d’optimisme réside paradoxalement dans l’enterrement.
Donc le retour à la Terre, au corps maternel, par la mort, peut représenter l’ultime alternative au travail de la pensée.
Et l’on retrouve de nouveau une sorte d’espoir paradoxal dans cette quête du repos éternel, dans cette voluptueuse passivité et ce retour nirvanique à l’inorganique en la Terre-Mère.
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Écrits en rapport :
– Phénoménologie de la notion de sacrifice.
– Sexe et mort.