Au commencement de la vie représentative l’enfant est confronté aux frustrations, sa mère est accaparée par les autres enfants, la naissance d’un puiné, son mari, son travail et quantités d’autres choses.
Le sein jadis « bon » et gratifiant devient peu à peu mauvais et l’enfant lui-même avec l’apparition des premières dents est capable de mordre le sein maternel.
L’enfant est confronté à un réel frustrant et menaçant et dans le même temps il est lui-même en proie, et c’est peut-être le plus angoissant pour lui, à sa propre agressivité, à sa propre violence…
Et à ce stade d’immaturité et de non-reconnaissance claire ou de non-distinction entre l’extérieur et l’intérieur, l’enfant va vivre dans l’horreur apocalyptique de la crainte des mauvais objets qu’ils soient internes ou externes.
Certes l’enfant est lui-même dépositaire des angoisses archaïques de son espèce, les meurtres, les génocides, les massacres que l’homme perpétue depuis des dizaines voire des centaines de milliers d’années sont engrammés en lui.
D’où les angoisses de mort, les pulsions de mort, les terreurs nocturnes qui l’assaillent de-ci de-là.
Bref, la peur terrible d’être agressé par les « mauvais objets », le « mauvais sein », la « mauvaise mère » déploie en lui une agressivité colossale et, en retour, des fantasmes d’agression des « mauvais objets », du « mauvais sein », de la « mauvaise mère ».
Mais tout cela est imaginaire et les fantasmes d’agression de l’enfant envers sa mère vont générer petit à petit des angoisses tout aussi terribles que les précédentes mais d’une tonalité différente.
En effet il va affreusement craindre que ses attaques ne fassent disparaitre sa mère, ne l’endommage.
Et ce sont les temps de disparition réelle de sa mère qui vont activer très fortement ces angoisses.
Il va se culpabiliser et la priorité dès lors n’est plus de craindre les attaques par les mauvais objets mais de s’assurer de la « réparation » de l’objet maternel.
Ainsi l’enfant par peur de son propre potentiel d’agression, qui ferait disparaître l’objet d’amour, renonce à son agressivité et naît à la sollicitude.
Confronté à la haine fantasmatique il n’a pas d’autre choix, s’il veut vivre, de renoncer à l’agression et de s’organiser vers la réparation, la sollicitude et l’amour.
Ainsi la peur d’endommager l’être auquel l’enfant est le plus attaché, dont il dépend complètement, impose à ce même enfant de renoncer à la haine pour pouvoir continuer à vivre psychiquement.
Le développement normal de l’enfant nous montre le chemin de la vie psychique (Vie).
Car l’enfant qui choisirait, à ce stade, la haine est un enfant qui ne pourrait se développer, qui ne saurait se maturer, et qui, donc, renoncerait à son humanité pleine et entière.
C’est en ce sens que l’on peut dire, en suivant Apulée et son mythe fameux, que Psyché n’est véritablement elle-même qu’unie à Amour.
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Écrits en rapport :
– De la question de la violence.
– De la genèse de la pulsion de mort.
– Prométhée ou le faux pas de l’intellect.
– Du fantasme fondamental de fusion (fff) à Amour.
– De la finalité des fonctions de pensée.
– L’aigle bicéphale à tête blanche et noire ou de l’ambivalence.