Ce qui fonde primitivement la question phallique, c’est le point, ce moment fort important, essentiel, fondamental où le petit enfant réalise que le regard de la mère se détourne de lui.
Là, effaré, il comprend que le désir de la mère se détourne de lui pour se porter vers le père.
Il réalise la force du désir maternel et la force de ce désir (de femme) concerne un autre, le père !
Là, l’enfant se trouve déchu, il quitte la fusion, il quitte la toute-puissance, il quitte l’omnipotence, il quitte la position bénie où il était lui-même le phallus de la mère.
Ainsi le phallus est l’objet du désir, et sa découverte par l’enfant coïncide avec le fait que c’est un autre qui est l’objet du désir de la mère.
Psychologiquement ce point est central, fondamental et fondateur sur le plan de la psychogénèse.
Donc qu’est-ce qui est le phallus de la mère (l’objet du désir maternel) ?
C’est le père et en particulier le pénis paternel.
Le pénis paternel est le phallus premier (Phallus).
Mais comment se décline le phallus en termes d’objets du désir ?
– L’objet du désir du nourrisson est le sein de la mère. Donc le sein est le phallus du bébé.
– L’objet du désir de la mère, tout de suite après l’accouchement, est son bébé. Donc le bébé est le phallus de la mère.
– L’objet du désir de la mère, dans un second temps, est le pénis du père. Et l’on a vu que le pénis du père représente le phallus premier (Phallus), c’est-à-dire celui par lequel toute la question phallique naît !
– L’objet du désir du père est la mère donc la mère est le phallus du père. Et ce qui constitue plus précisément le phallus du père, ce sont les seins et les fesses de la mère (comme le pénis du père constitue le phallus de la mère).
– Le phallus premier est ce point où l’enfant réalise que le père représente le désir de la mère. A partir de là on peut définir les phallus antérieurs (par exemple le sein comme phallus du bébé) et les phallus postérieurs (par exemple les seins les fesses comme phallus des hommes et les pénis comme phallus des femmes).
– Le phallus des hommes (les seins et les fesses) est d’essence double, il se rapporte à la dualité et à la Terre en tant que symbole fondamental.
– Le phallus des femmes (le pénis) est d’essence unifié, il se rapporte au Ciel comme symbole fondamental.
A la puberté chez la fille, la poussée hormonale avec l’émergence de la poitrine, est vécu comme une sorte de réparation de la « castration », elle sent bien que ce qui « pousse » attire le regard des hommes, qu’elle devient par le truchement de son corps objet de désir. Son corps devient phallus. C’est pourquoi on peut dire que le corps entier de la femme devient phallus !
Le corps de la femme devient à la fois phallus et symbole du manque !
Même si ce phallus est représentant de la dualité par opposition au pénis de l’homme qui est représentant de l’unicité !
Donc le sein est à la fois le phallus du bébé et le phallus de l’homme.
C’est pourquoi il est dit que l’homme ne change pas d’objet !
Il ne change pas d’objet même si le changement s’opère dans le sens passivité – activité.
En effet le bébé est totalement passif et dépendant du sein (son phallus de bébé).
Cependant que l’homme est actif par rapport au sein (son phallus d’homme).
L’objet est le même mais on est passé de la passivité à l’activité, d’un mouvement centripète à un mouvement centrifuge !
Pour la femme, il y a changement d’objet mais pas changement dans la qualité passivité – activité.
En effet pour la femme le phallus originel est toujours le sein (comme pour l’homme) et le phallus de la maturité est le pénis. Dans les deux cas elle demeure dans une certaine passivité par rapport à l’objet.
On voit bien là encore la pertinence de l’équation sein – pénis.
Mais elle passe d’un phallus double à un phallus unifié alors que l’homme au contraire reste dans le registre d’un phallus double.
D’autre part le sein, phallus du bébé, est d’essence maternelle alors que le sein, phallus de l’homme, est d’essence féminine.
L’un est en référence à la mère archaïque, l’autre à la femme sexuée, génitalisée et ayant intégré la Loi du père.
Et n’oublions pas non plus que la mère archaïque, dans le fantasme, est souvent pour ne pas dire toujours dotée d’un pénis !
Même si ce pénis est d’abord fantasmé arraché au père (oralité dévorante de la mère archaïque), incorporé par la mère, puis finalement totalement attribué à la mère, qui devient ainsi mère phallique.
Ainsi ce qui constitue le fantasme d’une mère toute-puissante (mère phallique) est le fait que cette mère possèderait un pénis. Ce qui veut dire que le pénis est conçu fondamentalement comme un objet réparateur (cf. à ce sujet l’œuvre de Melanie Klein). Et ce pénis qui répare la mère, qui la rend bonne, est bien sûr le pénis du père qui satisfait la mère (mais cette représentation est plus tardive et nécessite un développement psychologique plus proche de la position génitalisée).
Le phallus apparaît donc bien comme le pivot de toute la sexualité et de tout le psychisme humain (en référence partielle à la lecture de l’ordre sexuel de Gérard Pommier).
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Écrits en rapport :
– A propos de l’organisation phallique.
– Séparation d’avec la mère archaïque (Mère) et avènement de la fonction phallique.
– Orion ou le changement de paradigme.
– Amphiaraos ou la divination par les rêves.
– Prométhée ou le faux-pas de l’intellect.
– Thyrse dionysiaque ou une affaire de pin.
– A propos de la notion de pansexualisme freudien.
– « Phallus » et métaphore paternelle.
– De la fonction symbolique comme organisatrice de Psyché.
– De voir à Voir !
– Du sacrifice à la génitalité ou de la dimension phallique de l’existence.
– Repas totémique et incorporation de la toute-puissance paternelle.